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Vente à découvert et short squeeze : tout ce que vous devez savoir

Aujourd’hui, on va parler d’une des pratiques les plus controversées en Bourse : la vente à découvert (VAD) ou « short selling » en anglais.

La vente à découvert consiste à parier sur la baisse du prix d’un actif boursier à court terme.

Dans cet article, nous allons voir en quoi consiste le short selling, son intérêt et ses dangers (et ils sont nombreux).

Et enfin, au travers de deux exemples, je vous parlerai du phénomène de short squeeze.

Un évènement aussi rare que violent en Bourse !

Qu’est-ce que la vente à découvert (short) ?

La vente à découvert permet de vendre une action que l’on ne possède pas.

À quoi ça sert de short une action ?

D’un premier abord, ça peut paraître étrange de vendre une action que l’on n’a pas.

Normalement, lorsque l’on pense que le prix d’une action va monter, on l’achète. Quand on pense que son prix va baisser, on n’y touche pas.

Et bien la vente à découvert, ça permet de gagner de l’argent lorsque le prix d’une action baisse !

C’est pas dingue ça ?

Le short selling, ou vente à découvert, c’est l’exact opposé d’un investissement classique.

Si l’on pense que le prix d’une action va chuter, on la vend d’abord pour pouvoir la racheter ensuite à un prix plus faible, et empocher la différence.

Prenons un exemple

L’action X coûte 100€ et je pense que la société est très surévaluée.

Je la vends donc à découvert et empoche 100€.

Une semaine plus tard, l’action cote 80€. Je la rachète et j’effectue donc une plus-value de 20€ (100€ – 80€).

Sans oublier la commission

Dans les faits, le vendeur à découvert empoche moins que la simple différence entre prix de vente et prix de rachat.

En effet, comme on ne peut pas vendre quelque chose que l’on n’a pas, il faut bien l’emprunter à quelqu’un.

Dans la pratique, on va l’emprunter à un investisseur qui possède cette action.

Et lorsque l’on emprunte quelque chose à un propriétaire, tout comme pour un loyer dans l’immobilier, on lui paye une commission.

La vraie formule est donc :

Bénéfice VAD* = Prix de vente – Prix d’achat – commission payée au propriétaire de l’action

*VAD = Vente à découvert

Comment ça fonctionne la vente à découvert ?

Alors c’est bien beau tout ça, mais en réalité, comment ça marche ?

Comme nous venons de le voir, pour vendre à découvert (ou shorter) une action, il faut avant cela l’emprunter à un investisseur qui la possède.

Une fois le short clôturé, en rachetant les actions vendues, celles-ci sont rendues au propriétaire.

Pendant le laps de temps où les actions sont empruntées à son propriétaire, comme pour un appartement, il faut lui payer des « loyers ».

Ce « loyer » varie en fonction des actions.

Si une entreprise a très peu d’actions sur le marché et que celle-ci est très shortée, alors la commission à payer au propriétaire de l’action sera très élevée. Encore une fois, c’est le principe de l’offre et de la demande.

Pour connaître le taux d’intérêt à verser au propriétaire, on multiplie d’abord le prix de l’action à la clôture de la veille par un pourcentage fixe en fonction de la devise de l’action.

En général, 102% pour le dollar, arrondi au dollar supérieur. Et 105% pour l’euro, arrondi au centime supérieur.

Un exemple et tout sera plus clair

Jean-Michel Véhadé (notre trader dans cet exemple) vend à découvert 100 actions de la société A à $26.35.

Il reçoit donc $2,635.00 de cette vente à découvert.

La veille, cette action avait un prix de clôture de $26.48.

Les intérêts qu’il va devoir payer ce jour vont donc être calculés sur le montant suivant :

100 x $26.46 x 102% = $2,700.96 ; arrondi au dollar supérieur : $2,701.00

Imaginons maintenant que le taux d’intérêt emprunteur pour les actions de la société A soit de 20%.

Taux d’intérêt à payer ce jour = $2,701.00 x 20% / 360 jours = $1.50 par jour

Supposons que Jean-Michel Véhadé clôture son short (rachète ces 100 actions donc) une semaine plus tard lorsque l’action est à $24.32.

Jean-Mi a payé 100 x $24.32 = $2,432.00 pour racheter ces 100 actions.

Pour simplifier les calculs, on va estimer qu’il a payé $1.50 d’intérêts par jour d’emprunt.

Dans les faits, le montant des intérêts est calculé sur le prix de clôture de la veille, il varie donc tous les jours.

Il a donc payé 7 x $1.50 = $10.50 d’intérêts d’emprunt.

Bilan du short pour JM : $2,635.00 – $2,432.00 – $10.50 = $192.50 de gain.

Bon… dans notre exemple tout se passe bien.

En réalité, la vente à découverte est une activité très dangereuse, comme nous allons le voir plus bas.

Quels sont les risques de la vente à découvert ?

Le problème fondamental de la vente à découvert, c’est que le temps est votre ennemi.

Premièrement, si vous suivez Le Coq de Wall Street, vous savez déjà que dans l’ensemble, le prix des actions en Bourse monte avec le temps.

Sinon, je vous invite à lire cet article : 7 idées reçues sur la Bourse

Vous devez donc être plus malin que l’ensemble du marché pour trouver l’action qui va perdre de la valeur.

Contrairement à l’investisseur long terme qui peut se permettre de choisir un ETF générique, y investir régulièrement, et laisser le temps faire des merveilles.

Deuxièmement, même si vous trouvez effectivement une action dont le prix va baisser, vous devez aussi avoir le bon timing !

La difficulté était déjà importante, elle devient titanesque !

Même si un business décroît, son action peut rester au même prix pendant plusieurs années.

Et comme nous l’avons vu plus haut, chaque jour qui passe, vous devez payer des intérêts au propriétaire des actions vendues.

Imaginons que 3 ans après l’ouverture de votre short, l’action perde 50% de sa valeur et que vous clôturiez votre position.

À quoi bon avoir « gagné » 50% si vous avez dans le même temps payé 60% d’intérêts emprunteurs pendant ces 3 années ?

Le short selling, c’est l’exact opposé de l’investissement long terme.

Les gains sont limités, alors que les pertes sont potentiellement illimitées !

Est-ce vraiment une position dans laquelle on veut se trouver ?

En effet, si vous achetez une action 100€, le pire qui puisse vous arriver est de perdre ces 100€, si l’entreprise fait faillite.

Par contre si cette action monte à 200€, 300€, 400€… vous avez un retour sur investissement démultiplié !

Imaginons maintenant que vous shortiez cette action à 100€.

La meilleure chose qui puisse vous arriver est que l’entreprise fasse faillite.

Vous gagnez donc 100€, soit un retour sur investissement de 100% (le maximum possible en vendant à découvert, une entreprise ne pouvant pas avoir un prix négatif).

Par contre, si l’action monte à 200€, vous avez perdu 100€, soit 100% de votre « investissement ». Si elle monte à 300€, vous avez perdu 200% de votre « investissement » initial, etc.

Voilà pourquoi, outre l’éthique de la pratique (vous pariez sur l’échec des autres, ce qui peut provoquer des ruines et des pertes d’emploi), le short selling est extrêmement dangereux.

Vous pouvez théoriquement perdre une somme infinie !

Les bons investisseurs en connaissent les risques et, outre des cas extrêmement spécifiques, il est rarement judicieux de vendre à découvert une action.

Un point essentiel : la contrepartie

Une dernière chose que je n’ai pas évoquée plus tôt, et qui rajoute encore un peu plus de risque à cette pratique…

Non seulement les pertes sont potentiellement illimitées, mais vous pouvez en plus être FORCÉ de clôturer votre position !

Autrement dit, vous pouvez être forcé de générer des pertes !

En effet, l’un des principaux métiers d’un établissement financier, que ce soit la banque ou le courtier, c’est de gérer le risque.

Au vu du risque inhérent à l’ouverture d’une position de VAD, vous vous doutez bien qu’un courtier ne peut pas vous laisser vendre à découvert sans aucune contrepartie.

Imaginez que le prix de l’action vendue à découvert s’envole. Que se passe-t-il si vous vous trouvez dans l’incapacité de racheter les actions vendues ?

Prenons l’exemple de quelqu’un qui short une action à 10€ et son prix s’envole à 100€.

Si ce trader avait récupéré 10 000€ lors de la vente à découvert de 1000 actions (à 10€), il faut maintenant qu’il débourse 100 000€ pour les racheter !

« Du coup, si le short est dans l’incapacité de racheter les actions, le propriétaire les a perdues ? »

Bien évidemment, non.

Celui qui vend à découvert doit toujours avoir une somme liquide, donc disponible (argent, actions, ou les deux), lui permettant de racheter les actions shortées.

Si le prix des actions qu’il a vendues à découvert monte, il devra soit :

  • augmenter ses liquidités afin de couvrir le risque
  • racheter les actions short pour diminuer le risque.

Dans ce dernier cas, le short seller peut engranger d’importante perte d’argent.

Short squeeze : le tsunami de la Bourse

Ils sont extrêmement rares et nécessitent un certain nombre de prérequis pour se produire.

Mais une fois les conditions en place, la moindre annonce peut provoquer un véritable tsunami financier !

Qu’est-ce qu’un short squeeze ?

Le short c’est bon, on vient de voir ce que c’était. La vente à découvert d’une action dans l’espoir que son prix chute.

Squeeze pour presser, comprimer.

Qu’est-ce qui pourrait bien « presser » les traders qui pratiquent le short ?

Un short squeeze, c’est une réaction en chaîne.

Imaginez une entreprise dont la majorité des actions sont shortées.

Une bonne nouvelle pousse quelques investisseurs à acheter des actions de cette entreprise. Cela fait automatiquement monter le cours de son action.

Les shorts ayant les plus faibles contreparties sont forcés à clôturer leur position, et donc à racheter les actions qu’ils avaient vendues à découvert.

Ces achats exercent eux-mêmes une pression positive sur le cours de l’action, ce qui continue de faire monter son prix.

Cette augmentation du prix force de nouveaux shorts à clôturer leur position, entraînant encore et toujours l’augmentation du prix de l’action.

Vous avez compris le principe, cet engrenage fait monter les prix de façon exponentielle !

Le prix de l’action de la société est complètement décorrélé de la réalité, mais les vendeurs à découvert sont forcés à acheter pour couvrir le risque d’absence de contrepartie.

Les conditions nécessaires à un short squeeze

Comme dit précédemment, les shorts squeeze sont extrêmement rares.

Et heureusement, ce ne sont pas des conditions de marché saines, même pour les investisseurs ayant une vision long terme.

Pour être déclenché, ce type d’évènement nécessite des conditions très particulières.

Déjà, pour qu’il y ait short squeeze, il faut qu’une majeure partie des actions de la compagnie soit vendue à découvert.

Dans la partie « statistiques des actions » sur Yahoo Finance par exemple :

Statistiques des actions Beyond Meat

Pour la compagnie Beyond Meat ici, qui est l’une des sociétés les plus vendues à découvert en ce début d’année 2022, on voit que 35,85% de ses actions en circulation sont vendues à découvert, soit 19,12 millions d’actions.

Ensuite, on s’intéresse au volume d’échange des actions de la société.

Dans notre exemple, on voit qu’en moyenne sur les 3 derniers mois, 3,8 millions d’actions de cette société ont été échangées en Bourse quotidiennement.

Or, comme nous venons de le voir, il y a 19,12 millions d’actions shortées.

Autrement dit, il faudrait l’équivalent de 5 jours de volume d’échange pour que l’ensemble des vendeurs à découvert puisse fermer leur position. Avec 36% des actions en circulation vendues à découvert, il va être difficile de clôturer leur position tous en même temps…

Et enfin il faut un catalyseur, quelque chose qui va lancer la remontée du prix de l’action et donc entraîner les premiers shorts à clôturer leur position. Et c’est ainsi que la réaction en chaîne commence.

Mais attention, encore une fois les shorts squeeze sont extrêmement rares.

Si certaines actions ont énormément de vendeurs à découvert, c’est en général pour une bonne raison.

Et lorsqu’il n’y a pas de bonne nouvelle, les shorts peuvent couvrir leur position au fil du temps sans faire remonter excessivement le prix.

Quelques shorts squeeze les plus connus de l’histoire

 

Short squeeze de Volkswagen en 2008

Pour rentrer tout de suite dans le sujet, voici le cours de Bourse de l’action Volkswagen en vue mensuelle :

Short squeeze Volkswagen en 2008

Le cours de Bourse de l’action est passé de 200€ à un pic de 950€ en l’espace de quelques semaines, voire quelques jours.

Le short squeeze de l’action Volkswagen est une référence, il est même appelé « la mère de tous les shorts squeeze » par certains investisseurs.

Comment cela a-t-il pu se produire ?

En 2006, l’entreprise Porsche a annoncé qu’elle voulait augmenter ses parts dans la société Volkswagen.

En achetant des actions sur le marché, cela a automatiquement fait monter le prix de l’action Volkswagen, ce que l’on voit très clairement sur le graphique.

Porsche achète des actions Volkswagen
Porsche augmente sa position au capital de Volkswagen
Le point de départ

En 2008 arriva la fameuse crise financière des subprimes : le marché entier s’effondre.

Volkswagen, comme la plupart des constructeurs automobiles, a énormément de dettes. De plus, la crise ayant fait perdre beaucoup d’argent, la demande pour les voitures neuves chute.

De nombreux investisseurs et hedge fund ont commencé a penser que l’action Volkswagen était alors surévaluée. En effet comme nous venons de le voir, son prix avait quadruplé ces 4 dernières années.

En mars 2008, Porsche a déjà acquis 31% de Volkswagen. Le Land de Basse-Saxe a quant à lui une position de 20% dans la compagnie automobile.

À cet instant-là, de nombreuses rumeurs laissaient entendre que Porsche cherchait à augmenter sa position à 75% du capital de Volkswagen, ce qu’ils ont démenti.

Le marché a continué à vendre à découvert les actions de Volkswagen, ce qui a eu pour conséquence d’en faire baisser le prix. Celui-ci est passé de 200 à 150€ en un mois.

Ce prix réduit a permis à Porsche de continuer d’acquérir des actions, bien que la société ait annoncé le contraire quelques mois plus tôt.

L’annonce qui débute le short squeeze

Le 26 octobre 2008, Porsche publie le communiqué suivant :

« En raison des distorsions dramatiques sur les marchés financiers, Porsche Automobil Holding SE, Stuttgart, a décidé ce week-end de divulguer ses avoirs en actions et ses positions de couverture liées au rachat de Volkswagen AG, Wolfsburg. À la fin de la semaine dernière, Porsche SE détenait 42,6 % des actions ordinaires de Volkswagen et en plus 31,5 % d’options dites réglées en espèces relatives aux actions ordinaires de Volkswagen pour se couvrir contre les risques de prix, ce qui représente un total de 74,1 %. »

Ainsi, à eux deux, Porsche (74,1%) combiné avec le Land de Basse-Saxe (20%) détenaient alors 94,1% de la société Volkswagen, ne laissant plus que 6% d’actions potentiellement achetables sur le marché.

Porsche a par ailleurs fait savoir qu’ils ne cherchaient pas à acquérir Volkswagen, mais qu’ils avaient fait cette annonce car il était clair qu’il y avait beaucoup trop de positions short sur le marché.

Porsche a donc fait cette annonce pour prévenir les vendeurs à découvert de la société Volkswagen et leur permettre de clôturer leur position « sans précipitation et sans faire face à des risques majeurs. »

Il était cependant trop tard, les 6% d’actions disponibles n’étaient pas suffisantes pour les 12% d’actions Volkswagen vendues à découvert.

C’est la panique, et en l’espace de quelques jours, l’action bondit de 200€ à presque 1000€ !

Short squeeze de GameStop en 2021

Celui-ci est bien plus récent et fait passer le short squeeze de Volkswagen pour de la rigolade… Jugez plutôt :

Short squeeze GameStop en 2021

En effet, le cours de l’action GameStop est passé de 17$ à 480$, soit une augmentation de plus de 2700% en l’espace de quelques jours !

Je ne vais pas autant rentrer dans les détails, d’autant plus que c’est un short squeeze qui a été très « politisé » par la suite.

Si vous tenez vraiment à en savoir plus, faites-le moi savoir en commentaire.

Pour faire très simple, ce sont de nombreux investisseurs particuliers, comme vous et moi, regrouper sur un réseau social (Reddit), qui se sont rendu compte d’une anomalie dans le taux de short de l’action GameStop.

En effet, 140% des actions disponibles de l’action GameStop étaient vendues à découvert.

Suite à cette constatation, de nombreux investisseurs se sont mis à acheter massivement des actions GameStop, dans l’unique but de provoquer un short squeeze.

Le forum Reddit a commencé à se faire connaître, entraînant toujours plus d’investisseurs à acheter des actions Gamestop.

Fin janvier 2021, arriva ce qui devait arriver, ces achats ont fait monter le prix de l’action, ce qui a poussé les shorts à couvrir leurs positions (et donc racheter des actions GameStop), et ainsi de suite.

Cette affaire a fait énormément de bruit puisque pour stopper l’achat des investisseurs particuliers et permettre aux Hedge Fund de couvrir leur short, un célèbre courtier américain a bloqué l’achat d’actions GameStop sur sa plateforme.

Mais c’est une tout autre histoire…

 

Conclusion

En bref et pour conclure cet article, qui j’espère vous aura plu et permit de découvrir et/ou mieux comprendre la vente à découvert.

La vente à découvert est une activité extrêmement dangereuse que je ne recommande absolument pas, et encore moins si vous êtes un novice en Bourse. J’espère que ces deux derniers exemples de short squeeze vous auront convaincus de ces dangers.

Il est néanmoins important de connaître cette pratique et son fonctionnement, de mon point de vue.

Même si mon mode d’investissement ne prône absolument pas la vente à découvert, vous l’aurez compris. Il est néanmoins possible d’en tirer avantage en tant qu’investisseur long terme. Nous verrons cela dans un futur épisode.

À bientôt pour un prochain article !

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